Dans l’acte de peindre une figure réaliste, il y a, chez Christian Ruault, la volonté d’offrir au regard de manière pérenne la représentation la plus fidèle de cette figure. Cependant, elle n’est pas une transposition exacte d'une réalité, elle n’a pas « été » telle que l’entendait Roland Barthe parlant de l’origine de la trace laisser par la lumière dans le fond l’appareil photographique. Elle est le produit d’un regard et d’une main, un regard qui a parcouru un visage, un corps ; d’une main qui a transcrit sur la surface du papier ou de la toile ce que percevait ce regard. L’artiste a tenté de se l’approprier, d’en prendre possession. Il y a, dans l’acte de dessiner un corps, quelque chose qui se rapproche de la main de l’amant qui parcourt du bout du doigt les courbes du corps de l’être aimé. Et cette main, cherchant à en saisir les contours, va les transcrire au gré de ses désirs et de ses maladresses. Cette tentative d’appropriation ne sera cependant toujours qu’un échec, car toujours le corps, mais plus encore l’être qui l’habite, lui échappera. Ce qui l’amènera à recommencer encore et encore. Cependant, cette entreprise ne sera pas totalement vaine, car il restera ces traces que l’on nomme œuvre.